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La Constitution espagnole de 1978 proclame que l’Espagne est un État social et démocratique de droit qui défend comme valeurs supérieures de son ordre juridique la liberté, la justice, l’égalité et le pluralisme politique. Le titre VI est consacré au pouvoir judiciaire et l’article 117 dispose que le principe de l’unité juridictionnelle est la base de l’organisation et du fonctionnement des juridictions.
Ces principes sous-tendent l’organisation des tribunaux à juge unique (juzgados, première instance) et des cours collégiales (tribunales, appel) espagnols et se concrétisent dans l’existence d’un seul corps de juges et de magistrats qui constituent le pouvoir judiciaire et sont indépendants, inamovibles, et responsables et ne sont soumis qu’à la Constitution et à l’autorité de la loi.
L’exercice du pouvoir juridictionnel – le pouvoir de juger et de faire exécuter les jugements – appartient exclusivement aux tribunaux à juge unique (juzgados, première instance) et aux cours collégiales (tribunales, appel) selon les modalités prévues par la loi et les traités internationaux.
Juridictions de droit commun - introduction
Il existe un grand nombre de tribunaux à juge unique (juzgados, première instance) et de cours collégiales (tribunales, appel), qui se partagent le travail en fonction des différents critères de répartition de la compétence prévus par la loi: matière, valeur du litige, personne concernée, fonction ou territoire, puisque l’unité juridictionnelle ne fait pas obstacle à l’existence de différentes juridictions ayant des compétences différentes. Les tribunaux et les cours exercent leur compétence exclusivement dans les matières qui leur sont attribuées par la loi.
La loi organique relative au pouvoir judiciaire, conformément à l’article 122 de la Constitution espagnole de 1978, définit la constitution, le fonctionnement et l’organisation des tribunaux et des cours.
Trois aspects fondamentaux doivent être distingués:
- l’aspect territorial;
- le caractère unipersonnel ou collégial des juridictions;
- l’aspect des compétences.
L’aspect territorial
Conformément à l’exposé des motifs de la loi organique nº 6/1985 du 1er juillet relative au pouvoir judiciaire, sur le plan territorial, l’État est organisé, à des fins judiciaires, en communes, circonscriptions juridictionnelles, provinces et communautés autonomes,
sur lesquels les tribunaux et cours suivants exercent un pouvoir juridictionnel: les tribunaux de paix, de première instance et d’instruction, de commerce, de la violence à l’encontre des femmes, pénaux, administratifs, les prud'hommes, les tribunaux d'application des peines et pour mineurs, ainsi que les Audiencias Provinciales (juridictions d’appel des provinces), les Tribunaux supérieurs de justice, l’Audiencia Nacional (juridiction nationale) et la Cour suprême (Tribunal Supremo).
L’Audiencia Nacional (juridiction nationale), la Cour suprême (Tribunal Supremo), les tribunaux centraux d’instruction et les tribunaux centraux du contentieux administratif exercent un pouvoir juridictionnel sur l’ensemble du territoire national.
Le caractère unipersonnel ou collégial des juridictions
En ce qui concerne le caractère unipersonnel ou collégial, les juridictions siègent toutes à juge unique, à l’exception de la Cour suprême, de l’Audiencia Nacional, des Tribunaux supérieurs de justice et des Audiencias Provinciales.
La Cour suprême, qui siège à Madrid, est la juridiction supérieure de tous les ordres, sauf en ce qui concerne les dispositions relatives aux garanties constitutionnelles. Elle se compose d’un président, des présidents de chambre et des magistrats déterminés par la loi pour chacune des chambres et sections.
La Cour suprême se compose des chambres suivantes:
- première chambre: chambre civile,
- deuxième chambre: chambre pénale,
- troisième chambre: chambre du contentieux administratif,
- quatrième chambre: chambre sociale,
- cinquième chambre: chambre des affaires militaires, qui est régie par une législation spécifique et, à titre supplétif, par la loi organique sur le pouvoir judiciaire et par le règlement commun aux autres chambres de la Cour suprême.
L’Audiencia Nacional, qui siège à Madrid, est compétente sur l’ensemble du territoire espagnol. Elle se compose d’un président, des présidents de chambre et des magistrats déterminés par la loi pour chacune des chambres et sections (appel, pénale, contentieux administratif et affaires sociales).
Chaque communauté autonome comporte un Tribunal supérieur de justice, qui se trouve au sommet des ordres juridiques respectifs de ces communautés, sans préjudice des compétences de la Cour Suprême. Le Tribunal supérieur de justice prend le nom de la communauté autonome dans laquelle il se trouve et exerce sa compétence sur tout le territoire de celle-ci.
Il comporte trois chambres: civile, pénale, contentieux administratif et affaires sociales.
Il se compose d’un président – qui est également à la tête des chambres civile et pénale – des présidents de chambre et des magistrats déterminés par la loi pour chacune des chambres et, le cas échéant, des sections créées en leur sein.
Les Audiencias provinciales siègent dans les capitales de chaque province, dont elles prennent le nom, et sont de manière générale compétentes sur l’ensemble du territoire provincial. Elles se composent d’un président et de deux magistrats au minimum. Elles peuvent comporter plusieurs sections ayant la même composition, auquel cas le président de l’Audiencia est également à la tête de l’une des sections.
Elles sont compétentes pour les affaires déterminées par la loi en matière civile et pénale.
Office de la justice
La loi organique relative au pouvoir judiciaire définit l’office de la justice comme «l’organe ad hoc servant de soutien et d’appui à l’activité juridictionnelle des juges et des tribunaux».
L’Office a été conçu pour améliorer l’efficacité, l’efficience des organes judiciaires et la transparence des actes judiciaires, faciliter les démarches et les processus et encourager la coopération et la coordination entre les services et unités qui composent l’Office de la justice. Sa mise en service répond, par conséquent, à l’engagement de proximité et de qualité d’un service public conforme aux valeurs constitutionnelles et adapté aux nécessités contemporaines des citoyens.
Il est doté d’un nouveau modèle organisationnel qui introduit des techniques de gestion modernes tout en combinant différentes unités administratives: les unités procédurales de soutien direct, équivalentes aux anciens juzgados (juridiction composée d’un seul juge ou magistrat), qui assistent le juge ou le magistrat dans sa fonction juridictionnelle, et les services procéduraux communs, dirigés par les greffiers (Letrados de la Administración de Justicia), qui ont une compétence d’exécution et de décision pour toutes les fonctions qui ne sont pas strictement juridictionnelles, telles que la réception d’actes, les notifications, l’exécution des décisions, les formalités procédurales non judiciaires, l’examen de la recevabilité des demandes, la communication des décisions aux parties, le traitement des vices de procédure, etc.
Il existe trois types de services procéduraux communs:
- le service commun général;
- le service commun d’organisation de la procédure;
- le service commun d’exécution.
L’aspect des compétences
Outre la composante territoriale, il convient de faire une distinction entre les différents litiges ou matières dans lesquels les juridictions statuant à juge unique et en formation collégiale peuvent être amenées à connaître, et qui correspondent aux quatre ordres juridictionnels suivants.
Les juridictions civiles: les cours et tribunaux de l’ordre civil connaissent, en plus des matières qui leur ont été assignées, de toutes les matières qui ne sont pas attribuées à un autre ordre juridictionnel. Cet ordre peut donc être qualifié d’ordinaire ou de droit commun.
Les juridictions pénales connaissent des affaires et procédures criminelles, à l’exception de celles relevant de la juridiction militaire. La possibilité d'exercer l'action civile découlant d’une infraction pénale conjointement avec l’action pénale est une caractéristique du droit espagnol. Dans ce cas, le tribunal pénal décidera de l’indemnisation à accorder en réparation des dommages et préjudices occasionnés par l’infraction.
Le contentieux administratif: la Constitution prévoit que les tribunaux contrôlent le pouvoir réglementaire et la légalité des actes administratifs, ainsi que la conformité de ceux-ci aux buts poursuivis. L’ordre juridictionnel du contentieux administratif est responsable du contrôle de la légalité des actes de toutes les administrations publiques et des actions en responsabilité patrimoniale intentées à leur encontre. En effet, les particuliers peuvent, selon les modalités prévues par la loi, prétendre à une indemnisation de tout préjudice à leurs biens ou leurs droits, sauf cas de force majeure, dès lors que ce préjudice découle du fonctionnement des services publics.
Le contentieux social, qui couvre les demandes en justice formées en vertu du droit social, aussi bien pour les litiges individuels que pour les litiges collectifs, ainsi que les actions intentées en matière de sécurité sociale ou contre de l’État lorsque ce dernier est responsable de la législation sociale.
Outre ces quatre ordres juridictionnels, il existe en Espagne une juridiction militaire.
Celle-ci constitue une exception au principe de l’unité juridictionnelle.
La Constitution établit les principes qui réglementent l’activité juridictionnelle et constitue le fondement de l’unité du pouvoir judiciaire de l’État. L’organisation et le fonctionnement des organes de la juridiction militaire, qui font partie du pouvoir judiciaire de l’État, se basent sur le principe de l’unité juridictionnelle. Ces organes ne rendent la justice que dans le domaine strictement militaire et, le cas échéant, dans les affaires déterminées par la déclaration de l’état de siège, conformément à la Constitution et aux dispositions législatives en matière pénale, de procédure et de discipline militaire.
En temps de paix, la compétence de la juridiction militaire est circonscrite au domaine strictement militaire. La juridiction militaire connaît des comportements qualifiés de délits dans le code pénal militaire ainsi que de n’importe quelle catégorie d’infraction en cas de déplacement des troupes en dehors du territoire national. En temps de guerre, la loi organique nº 4/1987 relative à la compétence et à l’organisation de la juridiction militaire prévoit une modification de cette compétence, la décision revenant alors aux Cortes generales (Parlement) et au gouvernement, si celui-ci y est habilité.
Dans l’ordre civil, la juridiction militaire est chargée de prendre les mesures conservatoires qui lui incombent en matière de succession testamentaire et ab intestat des membres des forces armées qui, en temps de guerre, décèdent en opération ou en mer. Dans ce contexte, elle se limite à apporter l’aide nécessaire à l’organisation des funérailles du défunt, à dresser l’inventaire de ses biens et à en réaliser l’évaluation provisoire, toujours sous le contrôle de l’autorité judiciaire civile compétente.
Les juridictions militaires sont composées de militaires de carrière, de membres des forces armées et d’attachés au ministère de la Défense,
répartis au sein: des tribunaux d’instruction territoriaux, des tribunaux d’instruction centraux, des cours militaires territoriales et de la cour militaire centrale. Toutefois, au sommet de la juridiction militaire figure la 5ª chambre de la Cour suprême.
Le tribunal militaire central, qui siège à Madrid et exerce sa compétence sur l’ensemble du territoire national, constitue un tribunal centralisé pour entendre de toutes les affaires que lui attribue la loi organique nº 4/1987 du 15 juillet définissant la compétence et l’organisation de la juridiction militaire.
Les tribunaux d’instruction militaires sont notamment chargés d’instruire les affaires pénales militaires qui portent sur des faits s’inscrivant dans le champ de leurs compétences et qui sont entendues par le tribunal militaire territorial compétent ainsi que de l’application des peines en lien avec les établissements pénitentiaires militaires et leurs détenus.
La création d’une chambre militaire au sein de la Cour suprême, dont le régime et le statut des membres sont soumis aux mêmes règles que les autres chambres, suppose l’unité au sommet des deux juridictions qui composent le pouvoir judiciaire de l’État.
Le fait que cette chambre soit composée de magistrats provenant de la juridiction de droit commun et de la juridiction militaire garantit l’équilibre dans une procédure juridictionnelle de rang supérieur, dans le cadre de laquelle sont habituellement traitées les affaires en cassation et en réexamen, même si un privilège de juridiction est logiquement accordé aux militaires de haut rang dont les actes pourraient être jugés par cette chambre.
Il n’existe en Espagne aucun ordre juridictionnel extraordinaire; cependant, au sein des ordres juridictionnels susmentionnés ont été créés des tribunaux spécialisés (compétence matérielle) statuant à juge unique. C’est le cas, par exemple, des tribunaux de la violence à l’encontre des femmes, des tribunaux d’application des peines et des tribunaux pour mineurs. Ces tribunaux sont des juridictions de droit commun, mais ils sont spécialisés en fonction de la matière. Pour en savoir plus, voir la page «Tribunaux et cours spécialisés en Espagne».
La compétence des différents tribunaux à juge unique et cours collégiales dans les quatre ordres juridictionnels existants est présentée ci-dessous.
Ordre jurisdictionnel civil
Sont compétents dans l’ordre juridictionnel civil la première chambre de la Cour suprême, la chambre des affaires civiles et pénales des tribunaux supérieurs de justice, les sections civiles des Audiencias Provinciales, les tribunaux de première instance et les tribunaux de paix, ainsi que certains tribunaux spécialisés (affaires familiales, commerce, marques communautaires, affaires de violence à l’encontre des femmes).
Les tribunaux de commerce, les tribunaux des marques communautaires et les tribunaux de la violence à l’encontre des femmes sont décrits dans la page consacrée aux juridictions spécialisées en Espagne.
Ordre jurisdictionnel pénal
Sont compétents dans l’ordre juridictionnel pénal la deuxième chambre de la Cour suprême, la chambre des affaires pénales de l’Audiencia Nacional, la chambre des affaires civiles et pénales des Tribunaux supérieurs de justice, les sections pénales des Audiencias Provinciales, les tribunaux pénaux, les tribunaux d’instruction, les tribunaux pour mineurs, les tribunaux d’application des peines, les tribunaux de la violence à l’encontre des femmes et les tribunaux de paix.
Les tribunaux pour mineurs, les tribunaux d’application des peines et les tribunaux de la violence à l’encontre des femmes sont décrits dans la page consacrée aux juridictions spécialisées en Espagne.
Ordre jurisdictionnel du contentieux administratif
Les juridictions de l’ordre du contentieux administratif comprennent la troisième chambre de la Cour suprême, la chambre du contentieux administratif de l’Audiencia Nacional, la chambre du contentieux administratif des tribunaux supérieurs de justice, les tribunaux à juge unique centraux du contentieux administratif et les tribunaux à juge unique du contentieux administratif.
Ordre jurisdictionnel social
Font partie de l’ordre juridictionnel social la quatrième chambre de la Cour suprême, la chambre des affaires sociales de l’Audiencia Nacional, la chambre des affaires sociale des cours supérieures de justice et les tribunaux des affaires sociales.
Les compétences de toutes les juridictions susmentionnées sont définies dans la loi organique relative au pouvoir judiciaire.
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