- 1.1. Décisions, actes ou omissions concernant certaines activités relevant de la législation de l’Union en matière d’environnement, mais non des directives relatives à l'EIE et à la DEI
- 1.2. Décisions, actes ou omissions relatifs aux procédures administratives à suivre pour respecter la législation nationale mettant en œuvre la directive 2001/42/CE relative à l’évaluation environnementale stratégique (EES)[1]
- 1.3. Décisions, actes et omissions concernant les procédures administratives à suivre pour respecter les exigences en matière de participation du public qui sont fixées à l’article 7 de la convention d’Aarhus pour ce qui est des plans et des programmes qui ne sont pas soumis aux procédures définies dans la directive 2001/42/CE relative à l’évaluation environnementale stratégique[2]
- 1.4. Décisions, actes ou omissions concernant également des plans et programmes devant être préparés conformément à la législation de l’Union en matière d’environnement[3]
- 1.5. Règlements d’exécution et/ou instruments normatifs juridiquement contraignants d’application générale utilisés pour mettre en œuvre la législation de l’Union en matière d’environnement et les actes réglementaires de l’UE en la matière[4]
1.1. Décisions, actes ou omissions concernant certaines activités relevant de la législation de l’Union en matière d’environnement, mais non des directives relatives à l'EIE et à la DEI
1) Quelles sont les dispositions législatives nationales applicables pour avoir qualité pour agir, tant pour les personnes physiques que pour les ONG souhaitant a) un recours administratif et b) un recours juridictionnel devant une juridiction nationale en ce qui concerne les procédures d’adoption de la décision, de l’acte ou de l’omission et son contenu (en particulier, conditions à remplir et éventuels délais s’appliquant à l’introduction d’un recours)? Quel est le degré d’efficacité de l’accès aux juridictions nationales au vu de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne et de toute jurisprudence nationale en la matière?
Comme déjà expliqué dans la partie 1, le droit légal des personnes physiques et des personnes morales à introduire un recours administratif ou juridictionnel contre un acte, une décision ou une omission est le même, que la nature du litige soit environnementale ou autre. L’accès à la justice est déterminé aux articles 29 et 146 de la Constitution. L’article 29 prévoit que chacun (y compris les non-Chypriotes et les personnes morales) a le droit de saisir, individuellement ou conjointement avec d'autres, toute autorité compétente, de voir sa requête traitée avec diligence et d'obtenir une réponse dans un délai de 30 jours. (Sont concernées les plaintes adressées aux services des administrations publiques ou à d'autres autorités publiques). L’article 146 précise qui a qualité pour saisir un tribunal de la décision, de l'acte ou de l'omission émanant d'une autorité publique; ces dispositions devraient dès lors s'appliquer aux questions environnementales. Pour opposer ledit droit, le plaignant doit démontrer un intérêt existant, personnel et légitime qui a été directement affecté par la décision, l'acte ou l'omission émanant d’une autorité publique, et ce d’une manière qui contrevient à la Constitution ou toute autre loi, ou qui constitue un abus de pouvoir. Le plaignant doit exercer ledit droit dans les 75 jours suivant la date à laquelle l’événement est rendu public.
En vertu de la législation actuelle et de la jurisprudence chypriote, sauf si l’interprétation était élargie, les ONG étrangères n’auraient pas qualité pour agir hors du cadre des dispositions des lois EIE, PRIP/DIE et DRE. Ainsi, les ONG ou les personnes physiques qui ne vivent pas ou ne détiennent pas un bien situé à proximité de l'endroit de l’infraction pourraient difficilement contester les décisions environnementales, même si cela va à l’encontre des orientations du comité d’examen du respect des dispositions de la convention d’Aarhus et de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, qui imposent aux tribunaux nationaux d’interpréter les règles de la procédure nationale sur la base de la convention d’Aarhus et de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’UE afin d’élargir l’accès à la justice.
À notre connaissance, la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne n’a pas été citée ou mentionnée dans les décisions judiciaires, étant donné que, comme indiqué à la partie 1, section 1.1, les ONG ont rarement exercé des recours juridictionnels après que la Cour suprême a considéré en 1999 qu’elles n’avaient pas qualité pour agir. Il apparaît donc que les décisions de la Cour de justice de l’Union européenne n’ont pas produit d’effet substantiel. Il convient d’ajouter que l’absence de dispositions juridiques ou de précédents n’explique pas entièrement l’approche prudente des ONG vis-à-vis de l’utilisation de mesures judiciaire. Les ONG ont également été découragées par le manque d’aide financière, l’incertitude découlant de l’interprétation conservatrice des tribunaux et le manque conséquent d’avocats expérimentés dans ce domaine du droit.
2) Quelle est la portée du recours administratif (le cas échéant) et du recours juridictionnel (le cas échéant)? Ces recours couvrent-ils la légalité quant à la procédure et quant au fond?
Un recours administratif couvrira tous les aspects du litige considéré. En principe, le tribunal administratif saisi se prononcera sur la légalité formelle, sauf dans les questions d’erreur de droit ou de violation de droits constitutionnels, auquel cas le tribunal statuera aussi sur la légalité matérielle.
3) Avant d’introduire une action en justice, est-on tenu d’épuiser toutes les voies de recours administratif avant d’engager des procédures de recours juridictionnel?
Il est obligatoire d’épuiser toutes les voies de recours administratif avant d’engager des procédures de recours juridictionnel dès lors que la législation impose spécifiquement un recours administratif. Dans ce cas, le délai de 75 jours pour se pourvoir en justice sera suspendu pendant la durée du recours administratif.
4) Afin d’avoir qualité pour agir devant les juridictions nationales, est-il nécessaire de participer à la phase de consultation publique de la procédure administrative – de présenter des observations, de participer à l’audience, etc.?
Il n’est pas nécessaire, afin d’avoir qualité pour agir devant les tribunaux nationaux, de participer à la phase de consultation publique de la procédure administrative. La qualité pour agir dérive du droit légitime de recours inscrit dans la Constitution.
5) Y a-t-il certains motifs/arguments qui ne peuvent pas être avancés lors de la phase de recours juridictionnel?
Le tribunal administratif fondera sa décision sur les pièces du dossier concernant la décision, l’acte ou l’omission, qui doivent être présentées en totalité à la juridiction. Aucune question de fait autre que celles figurant au dossier ne peut être introduite, sauf dans des circonstances exceptionnelles et sur autorisation du tribunal. Voir également la réponse au point 1.5.1.
6) Procédures régulières, équitables – quelle est la signification donnée à l’égalité des armes au sein de la juridiction nationale?
Tant la Constitution que les règles de procédure juridictionnelle confirment que quiconque peut se pourvoir en justice. Toute personne a droit à un procès équitable et à des services d’interprétation si elle ne comprend pas la langue utilisée par la juridiction. L’article 30 de la Constitution est l’équivalent de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) et est interprété de manière plus ou moins similaire. L’article 30 s’applique à tous les types d’affaires, civiles, criminelles et administratives. Bien qu’aucune référence spécifique ne soit faite dans la Constitution à la notion d’«égalité des armes», celle-ci est intégrée dans le concept de procès équitable. Il existe un nombre considérable de précédents en la matière, renvoyant souvent aux décisions de la CEDH. Les principes ont récemment été mis à jour dans une décision rendue en 2020 sur un recours en matière criminelle: République/Stavrinou (266/2018). Le concept est fondé sur le principe selon lequel aucune des parties ne doit être désavantagée; ce ne sont pas des incidents particuliers pouvant survenir pendant le procès ou l’audience qui détermineront l’équité, mais une évaluation globale du procès. Néanmoins, dans l’affaire Marangos/Chypre du 4 décembre 2008, connexe à un recours administratif, la CEDH a conclu que les droits du plaignant n’avaient pas été affectés par un refus d’assistance juridique du gouvernement de Chypre. Toutefois, trois juges de la CEDH ont rendu une décision concomitante selon laquelle une limitation de l’assistance juridique aux affaires civiles et criminelles et une exclusion des affaires administratives constituaient une absence d’égalité des armes. Depuis lors, une assistance financière a été mise à la disposition des demandeurs d’asile ayant déposé un recours administratif.
7) Comment la notion de «rapidité» est-elle mise en œuvre par la législation nationale?
«Rapidité», en ce qui concerne le requérant, signifie la contestation d’une décision, d’une action ou d’une omission dans les 75 jours à compter de la publication, de l’autorisation ou de la prise de connaissance. «Rapidité» renvoie aussi à la durée d’une affaire. Si une audience est close et qu’une décision n’est pas rendue dans les six mois, des questions sont posées, et la partie intéressée peut saisir la Cour suprême. En pratique, les délais de tous les types de procédures sont très importants (à l’exception du tribunal des baux et loyers et du tribunal des affaires familiales en ce qui concerne les intérêts des mineurs). Des recours ont été déposés devant la Cour européenne des droits de l’homme à l’encontre de la République de Chypre en raison de retards des tribunaux. Il a été jugé que lesdits retards constituaient un déni de justice, et des amendes ont été infligées. La loi nº 2(1)/2010, fondée sur l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, fournit une cause d’action pour demander réparation d’un préjudice causé par un retard indu de la part d'une juridiction. Une décision de la Cour suprême rendue en 2019 dans l’affaire nº 1/2018, M.D. Cyprus Soya/ Procureur général, tend à indiquer que ladite loi s'applique aussi aux retards enregistrés lors de l'adoption de décisions en appel.
8) Des mesures de redressement par voie d’injonction sont-elles possibles? Si oui, quelles sont les exigences procédurales pour pouvoir se prévaloir de celles-ci? Des règles spéciales s’appliquent-elles à chaque secteur, en dehors des dispositions nationales générales?
À moins que la législation sectorielle n’en dispose autrement, aucune disposition particulière ne prévoit la délivrance d’injonction en matière d’environnement. Il est nécessaire de suivre et d’appliquer la procédure judiciaire normale. Dans le cadre d’un recours administratif, une requête peut être déposée pour qu’un arrêt provisoire suspendant l’effet de la décision administrative soit rendu. Ledit arrêt peut être prononcé dans des circonstances exceptionnelles, en cas d’illégalité flagrante ou de dommage irréparable. En général, ces conditions s’appliquent pour que des injonctions soient plus facilement accordées à une administration publique cherchant à empêcher un acte illégal (par exemple, empêcher un individu de démolir un immeuble classé). Voir aussi le point 1.7.2.6 relatif à ces garanties.
Un recours devant la Cour suprême est possible contre une décision de refuser une injonction.
9) Quelles sont les règles relatives aux frais encourus pour porter devant une juridiction une action en matière d’accès à la justice dans ces domaines? Quelles sont les conséquences possibles si l’on perd une affaire devant une juridiction? Comment l'absence d'effet prohibitif est-elle garantie pour ce qui est des frais? Les garanties existant en la matière incluent-elles une référence législative expresse à une exigence selon laquelle les frais ne devraient pas être prohibitifs?
Les honoraires des avocats constituent le coût principal; ils sont les mêmes que pour tous les autres recours en justice et s’élèvent à 1 500 euros environ, majorés des timbres, selon la complexité de l'affaire. Bien qu’il n’existe pas de garanties spécifiques contre les coûts prohibitifs, la question ne se pose pas véritablement. Les dépens adjugés par le tribunal à l’encontre d’une partie sont déterminés sur la base des barèmes judiciaires établis et ne représentent pas nécessairement l’intégralité des honoraires réglés par la partie à son avocat. Les tribunaux fixent les dépens qu’ils jugent appropriés. Le montant est souvent inférieur aux honoraires fixés entre une partie et son avocat. La partie qui succombe sera normalement condamnée aux dépens sur la base des barèmes ou à une partie de ceux-ci fixée par le tribunal. Dans des affaires dans lesquelles un particulier ou un organisme sans but lucratif poursuit l’État en justice, les tribunaux ont décidé que chaque partie serait condamnée à ses propres dépens. La décision appartient en grande partie au tribunal et n’est pas connue à l’avance.
1.2. Décisions, actes ou omissions relatifs aux procédures administratives à suivre pour respecter la législation nationale mettant en œuvre la directive 2001/42/CE relative à l’évaluation environnementale stratégique (EES)[1]
1) Quelles sont les dispositions législatives nationales applicables pour avoir qualité pour agir, tant pour les personnes physiques que pour les ONG souhaitant a) un recours administratif et b) un recours juridictionnel devant une juridiction nationale en ce qui concerne les procédures d’adoption de la décision, de l’acte ou de l’omission (en particulier, conditions à remplir et éventuels délais s’appliquant à l’introduction d’un recours)? Quel est le degré d’efficacité de l’accès aux juridictions nationales au vu de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne et de toute jurisprudence nationale en la matière?
La directive EES a été transposée en droit chypriote par la loi nº 102(1)2005. Cette dernière ne contient pas de disposition particulière sur les droits des personnes physiques ou des personnes morales à contester des décisions, des actes ou des omissions au titre de leurs droits constitutionnels (voir le point 2.1.1 ci-dessus sur l’article 146 de la Constitution de Chypre). L’existence juridique de ces droits dépend de la forme dans laquelle les plans ont été adoptés; si lesdits droits existent, leur réitération dans des lois sectorielles n’est pas nécessaire. En conséquence, toute personne morale ou physique dont les droits légitimes sont affectés peut exercer un recours administratif ou un recours en justice dans les 75 jours suivant la survenance de l’événement mis en cause. Toutefois, en l’état actuel de la jurisprudence, les ONG ne sont pas concernées, sauf si une loi leur octroie spécifiquement le droit d’opposer l’article 146 de la Constitution (comme c’est le cas en ce qui concerne les lois EIE, PRIP et DRE). La loi EES reconnaît aux ONG environnementales le droit d’être invitées à participer à une consultation du public. La définition du terme «public» énoncée à l’article 2 est large et englobe les personnes physiques et les personnes morales, les organisations et les groupes. L’article 15 précise que les ONG environnementales en font partie. Il a été constaté que des ONG environnementales s’étaient directement adressées à la direction générale de l’environnement à Bruxelles pour exprimer leur désaccord avec les décisions prises dans le cadre d’une évaluation environnementale stratégique ou pour attirer l’attention sur le fait qu’un processus EES n’avait pas été engagé.
On ignore si la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne en matière environnementale inclut des affaires dans lesquelles la Cour a pris acte de délibérations éventuelles. À ce stade, il serait juste de dire que cette procédure n’a guère été suivie d’effet. Il convient de préciser que, bien que la common law s’applique à Chypre dans des questions relevant du droit administratif ou constitutionnel, nous suivons la théorie et la pratique de la Grèce. Ainsi la jurisprudence grecque est souvent citée dans les affaires administratives, même si ce n’est qu’à titre d’information.
2) Quelle est la portée du recours administratif (le cas échéant) et du recours juridictionnel (le cas échéant)? Ces recours couvrent-ils la légalité quant à la procédure et quant au fond?
Un recours administratif n’est pas spécifiquement prévu. Néanmoins, s’il est recevable, il couvrira la légalité, à la fois quant à la procédure et quant au fond, d’une décision, d’un acte ou d’une omission. Un recours juridictionnel exercé devant le tribunal administratif couvrira les questions de légalité quant à la procédure et de compétence de l’organe exécutoire mis en cause, mais aussi quant au fond si la question concerne une erreur de droit, une violation de la Constitution, etc. ou des erreurs contenues dans le dossier.
3) Avant d’introduire une action en justice, est-on tenu d’épuiser toutes les voies de recours administratif avant d’engager des procédures de recours juridictionnel?
Avant d’introduire une action en justice, il n’est pas nécessaire d’épuiser toutes les voies de recours administratif avant d’engager des procédures de recours juridictionnel au titre de la loi EES.
4) Afin d’avoir qualité pour agir devant les juridictions nationales, est-il nécessaire de participer à la phase de consultation publique de la procédure administrative – de présenter des observations, de participer à l’audience, etc.?
Il n’est pas nécessaire, pour avoir qualité pour agir devant les juridictions nationales, de participer à la phase de consultation publique de la procédure administrative, la qualité pour agir d’un requérant dérivant du respect des dispositions constitutionnelles.
5) Des mesures de redressement par voie d’injonction sont-elles possibles? Dans l'affirmative, quelles sont les exigences procédurales pour pouvoir se prévaloir de celles-ci? Des règles spéciales s’appliquent-elles à chaque secteur, en dehors des dispositions nationales générales?
Il n’existe pas de règles spécifiques (voir les commentaires au point 2.1.8).
6) Quelles sont les règles relatives aux frais encourus pour porter devant une juridiction une action en matière d’accès à la justice dans ces domaines? Quelles sont les conséquences possibles si l’on perd une affaire devant une juridiction? Comment l'absence d'effet prohibitif est-elle garantie pour ce qui est des frais? Les garanties existant en la matière incluent-elles une référence législative expresse à une exigence selon laquelle les frais ne devraient pas être prohibitifs?
Les honoraires des avocats constituent le coût principal; ils sont les mêmes que pour tous les autres recours en justice et s’élèvent à 1 500 euros environ, majorés des timbres, selon la complexité de l'affaire. Bien qu’il n’existe pas de garanties spécifiques formulées contre les coûts prohibitifs, la question ne se pose pas véritablement. Les dépens adjugés par le tribunal à l’encontre d’une partie sont déterminés sur la base des barèmes judiciaires établis et ne représentent pas nécessairement les frais réels réglés par la partie à son avocat. Le principe selon lequel la partie qui succombe est condamnée aux dépens s’applique, mais la partie qui succombe sera normalement condamnée aux dépens sur la base des barèmes ou à une partie de ceux-ci fixée par le tribunal. Cependant, dans des affaires dans lesquelles un particulier ou un organisme sans but lucratif poursuit l’État en justice, les tribunaux ont décidé que chaque partie serait condamnée à ses propres dépens. La décision appartient en grande partie au tribunal et n’est pas connue à l’avance.
1.3. Décisions, actes et omissions concernant les procédures administratives à suivre pour respecter les exigences en matière de participation du public qui sont fixées à l’article 7 de la convention d’Aarhus pour ce qui est des plans et des programmes qui ne sont pas soumis aux procédures définies dans la directive 2001/42/CE relative à l’évaluation environnementale stratégique[2]
1) Quelles sont les dispositions législatives nationales applicables pour avoir qualité pour agir, tant pour les personnes physiques que pour les ONG souhaitant a) un recours administratif et b) un recours juridictionnel devant une juridiction nationale en ce qui concerne les procédures d’adoption de la décision, de l’acte ou de l’omission (en particulier, conditions à remplir et éventuels délais s’appliquant à l’introduction d’un recours)? Quel est le degré d’efficacité de l’accès aux juridictions nationales au vu de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne et de toute jurisprudence nationale en la matière?
Chypre a adopté l’article 7 de la convention d’Aarhus en incluant un cadre réglementaire régissant la participation du public dans plusieurs lois liées à l’environnement et concernant, par exemple, la pollution des eaux, les déchets, les émissions industrielles, les polluants atmosphériques, etc. Les dispositions pertinentes sont quasiment similaires et définissent le «public» à consulter ou à inviter à formuler des observations en tant que «personnes physiques ou personnes morales affectées, ou susceptibles d’être affectées», par l’acte adopté ou l’autorisation délivrée, y compris les ONG environnementales. Si les droits légitimes de personnes morales ou de personnes physiques sont affectés, les mesures correctives sont telles que décrites à l’article 29 de la Constitution relatif aux plaintes à l’encontre des autorités publiques, dans les cas où la législation spécifique ne prévoit pas de recours administratif. Les dispositions de l’article 146 de la Constitution s’appliquent aux cas de contestation judiciaire par voie de recours. À ce jour, des vices dans la procédure de consultation ont été soulevés par des personnes physiques ayant un intérêt légitime à obtenir la nullité d’une décision. La question de savoir si une ONG serait habilitée à contester la légitimité d’une action au motif d’un vice dans une procédure de consultation ne s’est pas encore posée. Le gouvernement prend actuellement des mesures pour renforcer la participation du public; toutefois, l’initiative ne concerne que les consultations menées en vertu de la loi EIE.
2) Quelle est la portée du recours administratif (le cas échéant) et du recours juridictionnel (le cas échéant)? Ces recours couvrent-ils la légalité à la fois quant à la procédure et quant au fond?
Un recours administratif, s’il est recevable, couvrira la légalité à la fois quant à la procédure et quant au fond d’une décision, d’un acte ou d’une omission. Le délai de 75 jours sera suspendu pendant la procédure de recours, si des dispositions le prévoient, ou pourra être suspendu par accord entre les parties. Un recours juridictionnel exercé auprès du tribunal administratif, comme dans tous les autres recours, couvrira les questions de légalité quant à la procédure et de compétence de l’organe exécutoire mis en cause, mais aussi quant au fond si la question concerne une erreur de droit, une violation de la Constitution, etc.
3) Avant d’introduire une action en justice, est-on tenu d’épuiser toutes les voies de recours administratif avant d’engager des procédures de recours juridictionnel?
Avant d’introduire une action en justice, il n’est pas nécessaire d’épuiser toutes les voies de recours administratif avant d’engager des procédures de recours juridictionnel, sauf si la législation prévoit spécifiquement le droit de recours administratif.
4) Afin d’avoir qualité pour agir devant les juridictions nationales, est-il nécessaire de participer à la phase de consultation publique de la procédure administrative – de présenter des observations, de participer à l’audience, etc.?
Il n’est pas nécessaire, afin d’avoir qualité pour agir devant les tribunaux nationaux, de participer à la phase de consultation publique de la procédure administrative. La qualité pour agir dérive du droit légitime de recours inscrit dans la Constitution.
5) Des mesures de redressement par voie d’injonction sont-elles possibles? Si oui, quelles sont les exigences procédurales pour pouvoir s’en prévaloir? Des règles spéciales s’appliquent-elles à chaque secteur, en dehors des dispositions nationales générales?
À moins que la législation sectorielle n’en dispose autrement, aucune disposition générale ne prévoit la délivrance d’injonction en matière d’environnement. Il est nécessaire de suivre et d’appliquer la procédure judiciaire normale. Dans le cadre d’un recours administratif, une requête peut être formée afin qu’un arrêt provisoire suspendant l’effet de la décision administrative soit rendu. Cet arrêt peut être prononcé dans des circonstances exceptionnelles, en cas d’illégalité flagrante ou de dommage irréparable. En ce qui concerne les garanties, veuillez consulter le point 2.1.8.
Un recours devant la Cour suprême est possible contre une décision de refuser une injonction.
6) Quelles sont les règles relatives aux frais encourus pour porter devant une juridiction une action en matière d’accès à la justice dans ces domaines? Quelles sont les conséquences possibles si l’on perd une affaire devant une juridiction? Comment l'absence d'effet prohibitif est-elle garantie pour ce qui est des frais? Les garanties existant en la matière incluent-elles une référence législative expresse à une exigence selon laquelle les frais ne devraient pas être prohibitifs?
Les honoraires des avocats constituent le coût principal; ils sont les mêmes que pour tous les autres recours en justice et s’élèvent à au moins 1 500 euros (montant majoré des timbres) selon la complexité de l'affaire. Bien qu’il n’existe pas de garanties spécifiques formulées contre les coûts prohibitifs, la question ne se pose pas véritablement. Les dépens adjugés par le tribunal à l’encontre d’une partie sont déterminés sur la base des barèmes judiciaires établis et ne représentent pas nécessairement les frais réels réglés par la partie à son avocat. Ainsi, conformément au principe selon lequel la partie qui succombe est condamnée aux dépens, la partie qui succombe sera normalement condamnée aux dépens sur la base des barèmes ou à une partie de ceux-ci fixée par le tribunal. Cependant, dans des affaires dans lesquelles un particulier ou un organisme sans but lucratif poursuit l’État en justice, les tribunaux ont décidé que chaque partie serait condamnée à ses propres dépens. La décision appartient en grande partie au tribunal et n’est pas connue à l’avance.
1.4. Décisions, actes ou omissions concernant également des plans et programmes devant être préparés conformément à la législation de l’Union en matière d’environnement[3]
1) Quelles sont les dispositions législatives nationales applicables pour avoir qualité pour agir, tant pour les personnes physiques que pour les ONG souhaitant a) un recours administratif et b) un recours juridictionnel devant une juridiction nationale en ce qui concerne le contenu du plan (en particulier, conditions à remplir et éventuels délais s’appliquant à l’introduction d’un recours)? Quel est le degré d’efficacité de l’accès aux juridictions nationales au vu de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne et de toute jurisprudence nationale en la matière?
Il n’existe pas de règles spécifiques pour contester les plans et les programmes à préparer conformément à la législation de l’Union européenne. Les règles générales régissant la qualité pour agir s’appliqueront de la manière décrite dans les dispositions de la loi EES. La position la plus forte de tout requérant sera fondée sur un refus d’accès à l’information ou un refus de participation du public à la procédure, étant donné que ces deux droits sont consacrés dans une législation d’application générale (concernant le droit à l’information sur l’environnement) et dans des lois sectorielles spécifiques (concernant le droit à participation). Le requérant n’est donc pas tenu de démontrer l’existence de droits constitutionnels.
2) La forme sous laquelle le plan ou le programme est adopté change-t-elle quelque chose en ce qui concerne la qualité pour agir en justice (voir également section 2.5 ci-dessous)?
La forme sous laquelle le plan ou le programme est adopté fait une différence en ce qui concerne la qualité pour agir en justice; elle ne peut être contestée que s’il s’agit d’un acte administratif.
3) Quelle est la portée du recours administratif (le cas échéant) et du recours juridictionnel (le cas échéant)? Ces recours couvrent-ils la légalité à la fois quant à la procédure et quant au fond?
Un recours administratif couvrira tous les aspects du litige considéré. En principe, le tribunal administratif saisi se prononcera sur la légalité formelle, sauf dans les questions d’erreur de droit ou de violation de droits constitutionnels, auquel cas le tribunal statuera aussi sur la légalité matérielle.
4) Avant d’introduire une action en justice, est-on tenu d’épuiser toutes les voies de recours administratif avant d’engager des procédures de recours juridictionnel?
Uniquement si la législation concernée le spécifie.
5) Afin d’avoir qualité pour agir devant les juridictions nationales, est-il nécessaire de participer à la phase de consultation publique de la procédure administrative – de présenter des observations, de participer à l’audience, etc.?
Il n’est pas nécessaire, afin d’avoir qualité pour agir devant les tribunaux nationaux, de participer à la phase de consultation publique de la procédure administrative.
6) Y a-t-il certains motifs/arguments qui ne peuvent pas être avancés lors de la phase de recours juridictionnel?
Le tribunal administratif fondera sa décision sur les pièces du dossier concernant la décision, l’acte ou l’omission, qui doivent être présentées en totalité à la juridiction. Aucune question de fait autre que celles figurant au dossier ne peut être introduite, sauf dans des circonstances exceptionnelles et sur autorisation du tribunal.
7) Procédures régulières, équitables – quelle est la signification donnée à l’égalité des armes au sein de la juridiction nationale?
La Constitution comme le règlement de procédure du Tribunal confirment que quiconque peut se pourvoir en justice. Toute personne a droit à un procès équitable et à des services d’interprétation si elle ne comprend pas la langue utilisée par la juridiction. L’article 30 de la Constitution est l’équivalent de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) et est interprété de manière plus ou moins similaire. L’article 30 s’applique à tous les types d’affaires, civiles, criminelles et administratives. Bien qu’aucune référence spécifique ne soit faite dans la Constitution à la notion d’«égalité des armes», celle-ci est intégrée dans le concept de procès équitable. Il existe un nombre considérable de précédents en la matière, renvoyant souvent aux décisions de la CEDH. Les principes ont récemment été mis à jour dans une décision rendue en 2020 sur un recours en matière criminelle dans l'affaire République/Stavrinou (266/2018). Le concept est fondé sur le principe selon lequel aucune des parties ne doit être désavantagée; ce ne sont pas des incidents particuliers pouvant survenir pendant le procès ou l’audience qui détermineront l’équité, mais une évaluation globale du procès. Néanmoins, dans l’affaire Marangos/Chypre du 4 décembre 2008, connexe à un recours administratif, la CEDH a conclu que les droits du plaignant n’avaient pas été affectés par un refus d’assistance juridique du gouvernement chypriote. Toutefois, trois juges de la CEDH ont rendu une décision concomitante selon laquelle une limitation de l’assistance juridique aux affaires civiles et criminelles et une exclusion des affaires administratives constituaient une absence d’égalité des armes. Depuis lors, une assistance financière a été mise à la disposition des demandeurs d’asile ayant déposé un recours administratif.
8) Comment la notion de «rapidité» est-elle mise en œuvre par la législation nationale?
«Rapidité», en ce qui concerne le requérant, signifie la contestation d’une décision, d’une action ou d’une omission dans les 75 jours à compter de la publication, de l’autorisation ou de la prise de connaissance. «Rapidité» renvoie aussi à la durée d’une affaire. Si une audience est close et qu’une décision n’est pas rendue dans les six mois, des questions seront posées et la partie intéressée peut saisir la Cour suprême. En pratique, les délais de tous les types de procédures sont très importants (à l’exception du tribunal des baux et loyers et du tribunal des affaires familiales en ce qui concerne les intérêts des mineurs). Des recours ont été déposés devant la Cour européenne des droits de l’homme à l’encontre de la République de Chypre en raison de retards des tribunaux. Il a été jugé que lesdits retards constituaient un déni de justice, et des amendes ont été infligées. La loi nº 2(1)/2010, fondée sur l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, fournit une cause d’action pour demander réparation d’un préjudice causé par un retard indu de la part du tribunal. Une décision de la Cour suprême rendue en 2019 dans l’affaire nº 1/2018, M.D. Cyprus Soya/Procureur général, tend à indiquer que ladite loi s'applique aussi aux retards enregistrés lors de l’adoption de décisions en appel.
9) Des mesures de redressement par voie d’injonction sont-elles possibles? Si oui, quelles sont les exigences procédurales pour pouvoir se prévaloir de celles-ci? Des règles spéciales s’appliquent-elles à chaque secteur, en dehors des dispositions nationales générales?
Les règles générales nationales s’appliqueront et des mesures de redressement par voie d’injonction ne seront prononcées que dans des circonstances très exceptionnelles (voir point 2.1.8).
10) Quelles sont les règles relatives aux frais encourus pour porter devant une juridiction une action en matière d’accès à la justice dans ces domaines? Quelles sont les conséquences possibles si l’on perd une affaire devant une juridiction? Comment l'absence d'effet prohibitif est-elle garantie pour ce qui est des frais? Les garanties existant en la matière incluent-elles une référence législative expresse à une exigence selon laquelle les frais ne devraient pas être prohibitifs?
Les honoraires des avocats constituent le coût principal; ils sont les mêmes que pour tous les autres recours en justice et s’élèvent à 1 500 euros environ selon la complexité de l'affaire. Même s’il n’existe pas de garanties spécifiques contre les coûts prohibitifs, la question ne se pose pas véritablement. Les dépens adjugés par le tribunal à l’encontre d’une partie sont déterminés sur la base des barèmes judiciaires établis et ne représentent pas nécessairement les frais réels réglés par la partie à son avocat. La partie qui succombe sera normalement condamnée aux dépens sur la base des barèmes, ou à une partie de ceux-ci fixée par le tribunal. Dans des affaires dans lesquelles un particulier ou un organisme sans but lucratif poursuit l’État en justice, les tribunaux ont décidé que chaque partie serait condamnée à ses propres dépens. La décision appartient en grande partie au tribunal et n’est pas connue à l’avance.
1.5. Règlements d’exécution et/ou instruments normatifs juridiquement contraignants d’application générale utilisés pour mettre en œuvre la législation de l’Union en matière d’environnement et les actes réglementaires de l’UE en la matière[4]
1) Quelles sont les dispositions législatives nationales applicables pour avoir qualité pour agir, tant pour les personnes physiques que pour les ONG souhaitant a) un recours administratif et b) un recours juridictionnel devant une juridiction nationale en ce qui concerne le contenu de la décision, de l’acte ou de l’omission de l’acte réglementaire national (en particulier, conditions à remplir et éventuels délais s’appliquant à l’introduction d’un recours)? Quel est le degré d’efficacité de l’accès aux juridictions nationales au vu de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne et de toute jurisprudence nationale en la matière?
Bien que la convention d’Aarhus ait été transposée, aucune loi spécifique n’a été votée sur la participation du public, comme cela a été le cas pour l’accès à l’information. La pratique qui consiste à associer le public au processus législatif en permettant aux groupes d’intérêt et/ou aux ONG environnementales de participer aux débats parlementaires ou, au niveau administratif, à la préparation de la législation ou de la réglementation, est moins formelle. Un guide a été publié sur les bonnes pratiques en matière de participation du public. Bien qu’il soit utilisé par les administrations publiques, il ne constitue pas un document juridique et ne donne donc pas naissance à des droits, sauf si une loi habilitante le prévoit spécifiquement.
On pourrait soutenir que, comme la convention d’Aarhus fait partie de la législation chypriote, les articles pertinents concernant la participation s’appliquent ipso facto. Cette position a été défendue par l’avocat des plaignants dans l’affaire nº 746/2019, Demetriou et al/Municipalité de Limassol, mais le tribunal administratif a estimé que les preuves étaient contradictoires et n’a pas fondé sa décision sur ce point.
[1] La directive EES concerne les plans et programmes. Ceux-ci sont également visés par l’article 7 et par l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus.
[2] Voir constatations dans l’affaire ACCC/C/2010/54 pour un exemple de plan non soumis à une EES, mais soumis aux exigences de participation du public visées à l’article 7 de la convention d’Aarhus.
[3] Ces plans et programmes relèvent à la fois de l’article 7 et de l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus. Voir également la jurisprudence pertinente de la Cour de justice de l’Union européenne, notamment dans l’affaire C‑237/97, Janecek, et dans les affaires C‑128/09, C‑131/09 et C‑182/10, Boxus et Solvay, telles que mentionnées dans la communication de la Commission C/2017/2616 sur l’accès à la justice en matière d’environnement.
[4] De tels actes relèvent de l’article 8 et de l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus. La décision de l’administration nationale visée dans l’affaire C‑281/16, Vereniging Hoekschewaards Landschap, ECLI:EU:C:2017:774., par exemple, constitue un tel acte.
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